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Position du TCS Genève concernant la lutte contre le bruit routier

Le département des infrastructures (DI) du canton de Genève a récemment publié sa stratégie cantonale de lutte contre le bruit routier et procédé à une consultation auprès des associations liées à la mobilité. La Section genevoise du TCS a participé au sondage en ligne et transmis son analyse que voici au DI.

23 juin 2021

Comptant près de 140'000 membres à Genève, notre association a pour but de sauvegarder les droits et les intérêts de ses membres dans la circulation routière et dans le domaine de la mobilité en général. En tant qu'organisation de services leader sur le plan national, nous visons notamment à garantir et promouvoir l'accès à la mobilité, le libre choix et la sécurité quel que soit le moyen de transport. Nous prenons en compte les exigences sociales, économiques et écologiques et formulons en ce sens des propositions visant à réduire les nuisances de la mobilité et non la mobilité elle-même.

Considérations générales concernant la lutte contre le bruit routier

Le TCS est pleinement conscient des enjeux sanitaires liés au bruit routier. Les modélisations de l’Office fédéral de l’environnement montrent qu’un habitant sur sept – soit plus d’un million de personnes – est exposé à un bruit routier dépassant le plafond fixé par la loi.

À Genève, une part très importante de la population, donc de nos sociétaires, est exposée à ce phénomène ; les valeurs limites moyennes préconisées par l’Ordonnance sur la Protection contre le Bruit (OPB) étant souvent dépassées en milieu urbain. C’est la raison pour laquelle la Section s’est engagée dans les domaines de la sensibilisation et de la prévention, en collaboration avec le SABRA. Cette coopération s’est établie en deux étapes. La première fut le soutien à l’élaboration du volet mobilité de la stratégie de lutte contre le bruit au sein de la Commission Bruit du Département du Territoire, avec notamment l’apport d’expertise concernant les pneus silencieux. La deuxième, qui est encore en cours, consiste en la pose de radar acoustique à vocation pédagogique permettant à la fois de récolter des données et de sensibiliser la population sur ce thème.

En juin 2020, le système déployé sur l’avenue Wendt fut une première Suisse en milieu urbain. De précédents essais réalisés par le TCS en 2019 sous l'égide de la Confédération ont démontré l'efficacité de cette technologie sur des routes de campagne. De cette expérience concrète, le TCS a pu tirer des éléments instructifs dans le cadre de la consultation en cours.

Comment réduire efficacement ce type de nuisances sonores ?

Pour le TCS, la meilleure mesure est sans doute de réduire les émissions sonores à la source. C’est d’ailleurs ce que préconise la base légale de la lutte contre le bruit (loi sur la protection de l’environnement et ordonnance sur la protection contre le bruit). Le bruit du trafic routier peut être atténué notamment grâce aux mesures suivantes: revêtements routiers phono absorbants et pneus silencieux, réduction de la vitesse, mobilité électrique en milieu urbain, style de conduite adapté, contrôle des véhicules bruyants..

Les revêtements silencieux

Le recours à des revêtements optimisés en termes de bruit a considérablement augmenté ces dernières années. La réduction des émissions sonores est obtenue grâce à une texture superficielle à la fois fine et poreuse. À l’état neuf, les revêtements peu bruyants réduisent le niveau sonore d’environ six décibels. Et vers la fin de leur durée de vie, une technologie de pointe permet d’obtenir encore une baisse d’environ trois décibels. D’un point de vue sonore, cela correspond à une réduction de moitié du trafic.

Les pneus silencieux

Le bruit d’un véhicule provient du moteur et du roulement des pneus. Avec une voiture moderne, le bruit des pneus sur la chaussée dépasse celui émis par le moteur à partir de 20–25 km/h. La différence entre des pneus silencieux et bruyants de même dimension est d’environ trois décibels. De nouvelles études montrent que les pneus silencieux le restent tout au long de leur durée de vie et fonctionnent sur toutes les surfaces, en particulier les revêtements optimisés.

La réduction de la vitesse

Les mesures effectuées lors de la pose de radar acoustique sur l’avenue Wendt montrent qu’il y a une corrélation entre le bruit et la vitesse. A partir de 50 km/h, en moyenne, les voitures font plus de bruit que les moto (jusqu'à 5dB). Le phénomène s'explique par un plus grand bruit de roulement (quatre roues et poids du véhicule) et par le fait que les motos roulent en général à bas régime à cette vitesse-là. Les pics de bruit les plus importants viennent principalement des motos, mais certaines voitures ont aussi dépassé le 90 db.
L’effet sonore d’une réduction de vitesse dépend de divers facteurs, tels que la constance du trafic ou le mix de véhicules. Pour que l’effet soit optimal, le trafic doit être fluide, ce qui évite en outre les pertes de capacité. Il faut aussi éviter les obstacles (par ex. les rehaussements) et maintenir les contacts visuels. Une réduction de la vitesse de 50 à 30 km/h entraîne une baisse moyenne du niveau sonore comprise entre 2 et 4,5 db. Les pics de bruit sont moins fréquents et moins élevés en dessous de 30km/h, mais ils subsistent. Dans les faits, la comparaison avant-après ne permet pas d’obtenir une réduction de vitesse d’environ 20 km/h, de sorte que le potentiel de réduction sonore se révèle bien inférieur.
Enfin, il convient de mettre en perspective les excès constatés lors des mesures prises pendant un mois sur cette avenue rectiligne : seuls 0.3% des usagers ont dépassé les 84db sur plus de 140'000 véhicules. La proportion ayant dépassé les 90 db étant infinitésimale… En conclusion, on peut s’interroger sur la nécessité d’appliquer des mesures qui touchent l’ensemble des usagers de la route, alors que les excès émanent d’un nombre très restreint d’entre eux.

Le comportement

Accélérations brusques, vrombissements inutiles, pots d'échappements modifiés : le bruit de la circulation peut être fortement augmenté lorsque certains conducteurs indélicats ne respectent pas le voisinage. Le comportement irrespectueux de quelques-uns peut avoir un effet indésirable totalement disproportionné. Ainsi, le pot d'échappement d'une moto ne respectant pas les normes dépasse facilement le vacarme d'un camion. En outre, une conduite trop nerveuse fait autant de bruit que le trafic généré par 20 voitures qui rouleraient simultanément en ville, même lorsque le pot d'échappement est aux normes. Cet écart sonore est encore plus frappant sur un tronçon routier au bénéfice d'un revêtement phono absorbant, aujourd'hui largement employé sur les axes bruyants mais totalement inefficace à l'égard des pétarades des pots d'échappements ou des vrombissements inutiles.
Ce constat révèle combien le comportement de l'utilisateur d'un véhicule peut être déterminant pour diminuer les nuisances sonores du trafic. Une étude menée en 2019 par le TCS démontre que les bruits excessifs peuvent être évités avant tout par un style de conduite adapté. Un nouveau test mené cette année conjointement par le TCS Genève et le SABRA sur la piste du Plantin à Meyrin démontre que le comportement d’un usager de deux-roues motorisé est déterminant, même à basse vitesse. Ainsi, une moto électrique peut s’avérer particulièrement bruyante (bruit de la transmission) en cas de conduite nerveuse, avec des accélérations et des freinages marqués.


Enfin, l’un des éléments essentiels en matière de comportement consiste en la modification technique de son véhicule. Activation du clapet, suppression de la chicane dans le pot d’échappement, installation d’équipement non homologué, gestion électronique de la puissance, autant d’interventions qui produisent des nuisances de façon volontaire. Lors des mesures effectuées avec le SABRA sur le circuit du Plantin, en conduite nerveuse le scooter « trafiqué » (modification du variateur) a été mesuré 15 db au-dessus du véhicule homologué.

Position du TCS Genève concernant la consultation sur la limitation de vitesse dans le cadre de la lutte contre le bruit routier

  • La baisse de la limite de vitesse impacte l’ensemble des usagers, alors que seule une infime minorité d’entre eux présentent des comportements provoquant des nuisances sonores.
  • Agir sur les limites de vitesse n’est pas la mesure la plus appropriée, et en tout cas pas la seule pour lutter contre les excès de bruit.
  • Pour lutter efficacement contre le bruit routier, le TCS Genève préconise de mettre l’accent sur deux mesures en particulier : adapter l’infrastructure (murs de protection, asphaltes phono-absorbants, végétation…) et inciter à modifier le comportement des usagers, par le biais de campagnes de sensibilisation et de contrôles renforcés.
  • Une uniformisation des limitations de vitesse dans les zones considérées risque de remettre en cause la hiérarchie des réseaux routiers. Le risque est important de voir les usagers privilégier les itinéraires aux distances les plus courtes, ce qui pourrait accroître le trafic routier dans les quartiers. Il est donc nécessaire de maintenir la logique de la LMCE, selon laquelle certains axes primaires doivent pouvoir absorber rapidement un volume de trafic important (en particulier dans la zone II), tandis que le réseau secondaire peut être développé dans l’optique de réduire le nombre de véhicules et de ménager les intérêts des riverains et des adeptes de la mobilité douce, en réduisant notamment les limitations de vitesses ou façonnant des zones spécifiques (zone 30, zone de rencontre).
  • Le TCS Genève s’oppose au moratoire sur les allégements, qui pourrait conduire à appliquer systématiquement la méthode la plus facile et la moins coûteuse, à savoir l’abaissement de la limite de vitesse sans discernement. Il convient de laisser les tribunaux trancher au cas par cas en fonction des recours déposés.

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