De la neige fraîche est tombée en montagne durant la nuit, le bulletin d’avalanche est bon et les météorologues nous promettent une journée d’hiver ensoleillée. Des conditions parfaites pour la pratique du free touring dans la poudreuse. Nous mettons le cap sur Andermatt, dans le canton d’Uri, qui offre à cet égard de très bonnes conditions. En quelques minutes, le premier téléphérique de la journée nous emmène au Gemsstock, à 2962 mètres d’altitude. Il y fait un froid mordant et, déjà, les cristaux de neige scintillent au soleil. Nous contrôlons notre équipement de sécurité, qui comporte un détecteur de victimes d’avalanche (DVA), un sac à dos ABS avec une sonde et une pelle à avalanche. Nous chaussons nos skis.
L’abrupte descente vers Schwarzwasser promet un plaisir total en neige profonde. Depuis là, nous montons nos peaux de phoque et ajustons nos fixations et chaussures en mode montée. La courte escalade vers la Gafallenlücke s’effectue sans encombre. La redescente en direction du Gitziälpetli et, plus loin, vers le Hinteren Loch, sont tout simplement fantastiques. Les pentes sont raides et régulières et, ce matin-là, nous sommes les premiers à dessiner nos traces dans la poudreuse. Un pur bonheur. Loin de l’agitation, skier dans un tel environnement montagnard préservé nous régale.
En bas de pente, notre équipement, une fois de plus, passe en mode montée. L’objectif est le Rotstock, situé à 2950 mètres d’altitude, qui est atteint en un peu plus d’une heure, via la Guspislücke. Notre effort est récompensé par une vue grandiose sur les Alpes bernoises et les Grisons. Depuis le sommet du Rotstock, deux variantes de descente s’offrent à nous: soit par la Vermigelhütte et l’Unteralptal, en direction d’Andermatt, soit par l’ouest, en direction d’Hospental.
Nous optons pour la seconde variante et les 1500 mètres de dénivelé négatif nous offrent un terrain de jeu de haut rang. Le groupe s’arrête plusieurs fois pour faire une courte pause. C’est le moment de respirer et d’observer les traces que nous venons de laisser dans cet immense tapis neigeux. Nous atteignons finalement la route du col du Gothard, qui descend vers Hospental. Le ski-bus nous ramène ensuite jusqu’à la gare d’Andermatt.
Cette journée est tellement plaisante qu’il serait vraiment dommage d’en rester là. Les froides températures nous garantissent une neige poudreuse et la situation avalancheuse reste à son niveau le plus faible. Le groupe décide ainsi de prendre le train en direction du col de l’Oberalp. Depuis là, les 600 mètres de montée jusqu’aux Seeplanggen en valent la peine, car les pentes qui nous ramènent ensuite jusqu’à Andermatt sont magnifiques.
Il existe d’autres très bons spots de free touring en Suisse. Mais l’un des plus beaux et des plus intéressants des Alpes se trouve dans l’Arlberg autrichien, non loin de la frontière suisse. Entre Stuben, St. Anton, Zürs, Lech et Warth, les montagnes du Vorarlberg offrent d’innombrables possibilités pour de la glisse en pentes vierges. Nous y retrouvons Nadine Wallner, une habitante de la région, deux fois championne du monde de freeride et guide de montagne, qui s’adonne au free touring depuis quelques années. Cette skieuse professionnelle de 33 ans a chaussé ses premières lattes dès l’âge de trois ans et elle a accompagné son frère sur les cimes deux ans plus tard. C’est son père, également guide de montagne, qui l’a véritablement initiée à cette discipline. C’est ainsi qu’à l’âge de six ans, elle a réussi un véritable défi en freeride, en maîtrisant la fameuse et très abrupte descente ouest de la Valluga, à 2811 mètres d’altitude.
Elle explique la notoriété de l’Arlberg par la structure de son terrain, qui se prête parfaitement au freeride et au free touring. «Les courtes montées, comme celles de la station d’Albona II, sur le Maroiköpfe, et les longues descentes du sommet, à 1300 mètres d’altitude, dans la vallée de Verwall sont idéales pour la pratique du free-touring», explique-t-elle. Bien qu’il y existe des descentes en couloir très difficile, le terrain est généralement facile à maîtriser et peu exposé. De plus, la région bénéficie d’un enneigement relativement sûr – Zürs se situe à 1717 mètres d’altitude. Elle n’a pas vraiment de descente favorite, elle préfère les choisir en fonction des conditions qui lui conviennent. Elle recherche des zones où elle peut effectuer des virages rapides et des sauts. «En freeride, il n’y a pas de règles, chacun est libre de décider ce qui est bien ou non», ajoute-t-elle. Bien sûr, dans ce sport, le risque est toujours présent, elle le sait très bien puisqu’elle est également guide de montagne. En plus d’une bonne condition physique et d’un bon niveau de ski, les adeptes doivent connaître les dangers alpins, comme les avalanches. En free touring, on recherche des pentes vierges, c’est pourquoi une grande expérience est indispensable. Il est impératif de planifier sérieusement chaque itinéraire en tenant compte de tous les facteurs. Nadine Wallner sait par expérience que renoncer est parfois la meilleure décision. La pratique du free touring n’est définitivement pas adaptée aux débutants ou aux skieurs inexpérimentés.
Free touring dans l’Arlberg: infos sur le domaine et ses guides: lechzuers.com; hébergement: edelweiss-arlberg.at, chambre double avec petit déjeuner à partir de 165 euros.
S’équiper pour le free touring
Contrairement au ski de randonnée, le free touring est plutôt orienté descente. Le poids joue un rôle moins important et les skis sont souvent plus larges.
Skis: skis de freeride ou de randonnée à partir d’une largeur de 95 millimètres au milieu du ski, tel le Movement GO 98 (largeurs pour une longueur de 178 centimètres: 126/98/114 millimètres).
Fixations: fixation de randonnée robuste comme l’ATK C-Raider 12.
Chaussures: chaussures de randonnée avec de bonnes propriétés de descente, comme l’Atomic HAWX Ultra XTD 130 CT GW.
Vêtements: par couches, avec pantalon et veste hardshell, veste softshell ou doudoune légère, gants et casque.
Equip. de sécurité: sac à dos ABS, DVA, sonde, pelle et trousse de secours.