Le photographe français Olivier Morin, lui, adore ça. L’hiver, il surfe en Finlande et dans les îles Lofoten, en Norvège.
Quelle mouche vous a donc piqué pour en arriver à surfer par des températures polaires?
Olivier Morin: Il y a dix ans, j’ai lu dans un magazine qu’un surfeur américain de légende s’aventurait dans les vagues des îles Lofoten durant l’hiver. Je me suis dit qu’il fallait une sacrée dose de courage pour aller surfer par des températures de deux ou trois degrés, et j’ai commencé à m’y intéresser. J’ai alors réalisé que le surf existe depuis longtemps dans ces contrées. Il y a quelques années, j’ai rencontré un homme de 72 ans qui avait construit la première planche de surf en Scandinavie. C’est par son intermédiaire que j’ai appris l’existence du «surf camp» d’Unstad, dans les îles Lofoten, géré par sa fille. Il est magnifiquement situé au bord d’un fjord aux plages de sable blanc, à 18 kilomètres seulement d’une ville. Les surfeurs viennent du monde entier car les vagues y sont fantastiques, malgré les 30 degrés de moins qu’à Hawaï. Il n’y a que dans les Lofoten qu’il est possible de se rendre à la plage en snowboard et de monter sur sa planche. C’est là qu’est né mon enthousiasme pour le surf d’hiver. La Finlande, pays où je vis, est située sur la mer Baltique. Pour que les vagues nous conviennent, il faut beaucoup de vent et il fait alors vraiment froid. A –29 degrés, le ressenti est de –50 degrés. Mais j’adore ça. Pour accéder à l’eau, nous devons d’abord escalader des blocs de glace. Il y a deux ans, le 25 décembre, j’étais tout seul sur ma planche quand il a commencé à neiger légèrement. C’était magique!
Magique, oui, mais comment supporter un froid de cette intensité?
Au début, je pensais aussi que ce serait terrible. Mais quand la température extérieure indique –15 degrés, l’eau est peut-être à deux ou trois degrés. Ce qui est presque supportable.
Mais diablement froid tout de même…
Mon conseil: n’hésitez pas longtemps et entrez tout de suite dans l’eau. Dès que vous bougez, vous aurez plus chaud. La combinaison doit être munie d’une capuche. Comme on a très vite froid aux mains et aux pieds, je recommande des chaussons de surf de sept millimètres d’épaisseur et des gants. Parfois, j’emporte un thermos d’eau chaude et j’en verse un peu dans les chaussons et dans les gants avant de les enfiler. Cela aide un peu. Ce qui est assez violent, c’est lorsque le visage est plongé dans l’eau pour la première fois ou lorsque des gouttes entrent dans la combinaison et coulent le long de la colonne vertébrale. Cela ressemble à l’idée que je me fais d’un choc électrique. Mais on finit par s’y habituer.
«Tous ressortent de l’eau le sourire aux lèvres»
En quoi le surf d’hiver est-il différent de sa version estivale?
Surfer au chaud est certes agréable, mais gérer le froid requiert une préparation différente. J’essaie à chaque fois de me mettre dans un état mental propre à me calmer intérieurement, comme si j’étais chez moi sur le canapé avant une petite sieste. Le temps d’enfiler ma combinaison et je me sens débarrassé de tout ce qui me tracasse. Je fais le vide dans ma tête, mais il est important de rester bien éveillé, car le surf en hiver demande encore plus de concentration qu’en été. Lorsque je suis sur la planche, je ne perçois plus que les vagues. Et les couleurs sont plus discrètes en hiver. Ce sont des nuances de blanc et de gris qui prédominent. C’est également beaucoup plus calme qu’en été car la neige atténue les bruits. C’est peut-être un peu cliché, mais le surf hivernal est tellement relaxant qu’il agit sur moi comme une caresse de mon âme. Et l’on se rend vite compte que le froid n’est pas aussi terrible qu’il n’y paraît. Malgré les basses températures, il est possible de rester deux heures dans l’eau. Beaucoup de mes amis en Finlande ne s’arrêtent que lorsqu’ils sont fatigués, et non parce qu’ils ont froid. Et tous ressortent de l’eau avec le sourire aux lèvres.
Interview: Juliane Lutz
Photos: Olivier Morin
Olivier Morin
Ce Bordelais de 57 ans est l’un des photographes les plus réputés de l’Hexagone. Sa photo d’Usain Bolt, avec un éclair au-dessus de sa tête, lors des championnats du monde de 2013 à Moscou, a été élue photo sportive de l’année en Italie et photo de l’année par Sports Illustrated. En tant que photographe, il s’est spécialisé dans le football, le rugby, l’athlétisme et le ski. Il a notamment participé à onze Jeux olympiques. Rédacteur en chef photo à l’Agence France-Presse (AFP) de 2016 à 2021, il est aujourd’hui chargé, pour cette même agence, des questions environnementales et du changement climatique. Toujours passionné de sports (aquatiques), il pratique le surf depuis son adolescence. Il vit en Finlande.
Ses spots favoris
Finlande: Pori (Yyteri), Hanko, Storsand; Norvège: Jæren (dans l’ouest du pays), Unstad et Flakstad dans les îles Lofoten.
oliviermorinphotography.com
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